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Echiquier du Roy René - Aix-en-Provence

Echecs & Pédagogie

"Il ne faut pas croire que le jeu d'Echecs ne soit qu'un amusement  frivole : il fait naître et fortifie en nous plusieurs qualités précieuses   et utiles dans le cours de notre existence."

                                                                                        Benjamin Franklin


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Au-delà de son simple aspect ludique ou de sa dimension de sport de compétition, le jeu d'échecs possède également de multiples vertus pédagogiques et éducatives. Selon J. Marolleau, de la Fédération Française des Echecs, en 1974 :

«Nul au demeurant ne conteste que les échecs soient un jeu qui dépasse largement le cadre d'une simple activité ludique. Le propos des échecs n'est pas, non plus, de donner et d'amplifier la seule capacité de vaincre un adversaire sur un terrain particulier. Leur propos est principalement de développer des aptitudes intellectuelles, morales et même physique, tant chez l'adulte que chez l'enfant et l'adolescent

Tout à la fois science, art, sport et divertissement, les échecs représentent la discipline carrefour-type, l'une des plus aptes à conférer au contenant récurrent de l'éducation un contenu réaliste, concret, opératoire.

Un préjugé tenace fait considérer la pratique du jeu d'échecs comme relevant d'une part d'un ensemble de recettes, et par là d'une simple aptitude à la mémorisation, d'autre part du calcul mécanique des combinaisons, et par là d'un automatisme relativement primaire. Il suffit de rappeler le nombre de coups possibles dès le 10e coup (près de 1030) pour dénoncer l'infantilisme de telles croyances et souligner les dimensions fantastiques de l'univers échiquéen: environ 10 10 70 configurations possibles.

La maîtrise d'un tel univers implique la mise en jeu de la totalité des processus de la pensée et de l'intelligence.

L'objet véritable des échecs devient ainsi, de fait, la formation d'un homme total, maître de sa condition physique, maître de ses réactions, maître de sa pensée, logique et créatrice.

Développant comme les mathématiques modernes le raisonnement et la logique, comme la géométrie classique l'imagination créatrice, le jeu d'échecs exclut pourtant le risque de l'abstraction gratuite en raison de la nature concrète de l'activité échiquéenne qui se déroule dans un espace-temps défini par la règle du jeu. Ainsi parente de la pensée mathématique, la pensée échiquéenne l'est tout autant que la pensée biologique et physiologique du fait de sa nature expérimentale.

Enfin, une corrélation troublante s'impose à l'évidence: au plan de la recherche pure ou appliquée, comme aux plans du commerce et de l'industrie, les pays à fort dynamisme sont invariablement ceux où l'on pratique massivement les échecs (ou parfois un autre sport cérébral, comme le Go au Japon) et avec succès.

Il ne s'agit pas là d'une coïncidence fortuite, et, sans prétendre à une relation de cause à effet, l'intensité de la pratique échiquéenne constitue à la fois un symptôme du niveau de développement intellectuel, économique et social, et une contribution, fut-elle modeste, à la progression d'ensemble d'une nation»

 

En pratique, de nombreuses études et observations pratiques ont démontré les principales qualités suivantes développées par la pratique du jeu :

- L'attention et la concentration

- Jugement et plan

- L'imagination et la prévoyance

- La mémoire

- La volonté de vaincre, l'endurance et la maîtrise de soi

- L'esprit de décision et le courage

- La logique mathématique, et l'esprit d'analyse et de synthèse

- La créativité

- L'intelligence

- L'organisation méthodique de l'étude et le goût pour les langues étrangères

- Capacité d'abstraction

- Maîtrise de ses émotions

- Esprit d'équipe

- Discipline sportive.


1)         L'attention et la concentration

Le jeu consiste entre un affrontement de deux camps, composés chacun de seize pièces dont plusieurs obéissent à des règles différentes. Il a comme base un échiquier de 64 cases. Le principe du jeu est de coordonner le mouvement des pièces, en vue d'atteindre le but final qui est de mater le Roi adverse. Cette ambition implique la mise en place de positions intermédiaires, où chaque pièce ou pion a un rôle défini. Il s'agit d'un champ de bataille ordonné aux phases sans cesse diverses où chaque élément dépend de l'ensemble. Une erreur ou un oubli, et c'est la perte d'une pièce qui diminue les moyens de combattre et qui affaiblit la position. Le jeu implique donc un effort d'attention soutenu qui exerce l'esprit et le fixe longtemps sur un même mécanisme. De même, le développement du jeu dans une direction et à un moment déterminé, appelle une concentration aiguë sur l'examen de toutes les conséquences proches et lointaines du coup choisi.

2)         Le jugement et le plan

Pour mener à bien sa tâche, le joueur doit sans cesse apprécier la valeur de sa position par rapport à celle de son adversaire et appliquer les principes stratégiques et tactiques qu'il a appris. Il doit dresser un plan dont il ne pourra s'écarter qu'en fonction des obstacles que lui opposera l'autre camp. Toutes les connaissances théoriques - principes de l'ouverture, du milieu et de la finale de partie - doivent être confrontées aux impératifs de la position.

3)         L'Imagination et la prévoyance

Ce sont deux qualités importantes qui consistent en la faculté d'anticiper le développement de la partie et spécialement la position de chaque pièce ou pion en tenant compte des idées, manoeuvres et combinaisons de l'adversaire. L'imagination se joint aux réalisations les plus courtes et les plus efficaces pour donner parfois des résultats surprenants où l'esthétique procure d'intenses satisfactions intellectuelles.

4)         La mémoire

La Partie d'échecs est une épreuve de longue durée. Le début de la partie est dominé par la stratégie qui s'exerce en de nombreuses ouvertures et variantes, sans cesse étudiées, revues et améliorées, et qui ont donné lieu à une volumineuse littérature échiquéenne. De même, plusieurs règles et positions typiques sont nécessaires au traitement des finales. L'élève est appelé à mémoriser les principales ouvertures pour gagner du temps de réflexion, ainsi que les positions caractéristiques dans les finales pour réaliser son avantage avec précision.

5)         La volonté de vaincre, l'endurance et la maîtrise de soi

Ces trois qualités sont requises de l'homme dans toutes ses actions et entreprises. Le jeu d'échecs est un moyen par excellence de les exercer. L'affrontement qu'il offre aux deux adversaires ne permet aucun répit. La victoire, enjeu de la lutte, ne peut s'obtenir que par une volonté constante de se surpasser et d'imposer à l'autre son système de jeu. Comme pour tout exploit sportif, scientifique ou artistique, cette volonté implique une préparation psychologique qui pèse d'un grand poids dans le succès recherché. La nécessité se fait surtout sentir dans les positions inférieures, où le joueur doit user de toutes ses ressources pour sauver la situation apparemment compromise. Quant à la maîtrtise de soi, à ne pas confondre avec le calme, elle permet de coordonner tous les éléments en présence et de prendre ainsi la bonne décision au bon moment: attaquer, rester passif ou contre-attaquer après une analyse et une synthèse sûre des moyens, des menaces, des combinaisons et manoeuvres qu'offre la position donnée.

6)         L'esprit de décision et le courage

Au début de chaque partie et à divers stade de celle-ci, l'élève se trouve devant plusieurs variantes et il doit choisir la plus favorable. Certaines sont plus tranchantes, souvent difficiles à prévoir avec de nombreuses combinaisons, pièges, etc., et peuvent être décisives. D'autres sont plus calmes, sans risques, tandis que les craintifs hésiteront devant l'insécurité. En enseignant les échecs, le professeur étudiera facilement le caractère de l'élève et pourra l'influencer sensiblement, par exemple, en faisant d'un «timide»¯ un «courageux raisonnable»¯ ou en tempérant un joueur «trop courageux».

7)         La logique mathématique et l'esprit d'analyse et de synthèse

L'importance de chacune des pièces se modifie en fonction de la place qu'elle occupe sur l'échiquier. Elles passent souvent de la position statique à la position dynamique. C'est l'effet des lois de la mécanique, du mouvement, de l'équilibre, de la force et de la relativité. Dans l'analyse des positions, il s'agit de choisir, à partir d'une multitude de variantes, les possibilités essentielles et de calculer avec précision les conséquences des coups, en tenant compte de chaque élément sans perdre de vue les ensembles. Après avoir choisi sa variante, l'élève effectuera un ultime contrôle de sa décision, il arrivera, après ce contrôle, qu'il renonce à la variante qu'il se proposait de jouer, à la faveur d'une autre, mieux étudiée. L'opération de repérage des variantes possibles exerce l'esprit d'analyse, alors que la récapitulation des conclusions fournies par l'analyse et leur contrôle, en vue du coup ou de l'idée stratégique ou tactique, éprouvent l'esprit de synthèse. Généralement, les joueurs d'échecs démontrent des dispositions spéciales pour le raisonnement mathématique et acquièrent un sens géométrique développé.

8)         La créativité

Les joueurs d'échecs sont constamment à la recherche de nouvelles variantes, ou d'améliorations d'anciennes variantes d'ouverture. Ils éprouvent une grande satisfaction à contester les appréciations sur certaines positions. Ce besoin d'innovation implique évidemment de solides connaissances théoriques. L'élève s'en rend compte rapidement et la joie que lui procurent ses propres découvertes l'encourage à l'analyse des parties de joueurs chevronnés.

9)         L'intelligence

C'est une qualité innée, mais qui peut aussi se développer. Les élèves manifestent des réflexes et un sens de la position qui leur permettent de discerner rapidement les bons des mauvais coups. Par l'étude systématique des échecs, les élèves qui ont le désir de progresser se rendent compte que pour devenir un bon joueur, 10% de talent suffisent, le reste étant le résultat d'un travail qui leur donne une intense satisfaction et la confiance en leurs « possibilités intellectuelles».

10)       L'organisation méthodique de l'étude et le goût pour les langues étrangères

Les possibilités qu'offre le jeu sont innombrables et paraissent défier toute analyse, et c'est ce qui en fait l'attrait. L'élève se voit ainsi rapidement contraint à faire des choix, à sérier des ouvertures favorites et à trouver une méthode de travail. Cet effort portera ses fruits dans toutes ses autres activités. La recherche le conduira à des ouvrages et revues dont la plupart sont éditées en langue étrangère, mais restent d'un accès facile en raison du fait que la notation des coups est la même partout. Et si l'élève consacre une partie de ses loisirs au développement de ses connaissances échiquéennes, il sera amené à participer à des tournois qui groupent des joueurs de tous pays. Ces contacts améliorent ses connaissances linguistiques et scelleront de solides amitiés par-delà les frontières. La devise de la Fédération internationale des échecs (FIDE), Gens una sumus, exprime bien cet aspect enrichissant.

Texte tiré de l'Annuaire de l'instruction publique de Suisse et paru chez Payot-Lausanne en 1977.

 

Pour notre part, nous ajouterons volontiers les points suivants à cette liste :

11)       Capacité d'abstraction

Même si le nom des pièces (Roi, Cavalier, Tour, ...) tend à donner un caractère concret et figuratif au jeu, sa pratique fait très rapidement appel aux capacités d'abstraction de l'esprit humain : schémas d'attaque type, positions inversées ("Indienne en premier", etc.), importance relative des trois paramètres fondamentaux de la stratégie échiquéenne que constituent le matériel, l'espace et le temps, création de "déséquilibres positionnels" pour obtenir un avantage.

12)       Maîtrise de ses émotions

Ce point ne signifie nullement qu'un joueur d'échecs doit devenir une sorte de robot calculateur froid, comme certains se plaisent à le présenter. Mais comme dans tout sport, un joueur d'échecs va connaître des hauts et des bas, des victoires retentissantes et des revers cuisants, de belles combinaisons ou au contraire d'horribles "gaffes". Dans cet affrontement de deux intelligences, la défaite peut être vécue de façon très douloureuse. L'expérience du jeu apprendra au praticien à gérer son ego, à ne pas sombrer dans la dépression après une défaite, et à ne pas non plus faire preuve d'une inutile arrogance après une victoire. L'analyse commune "post mortem" avec son adversaire lui apprendra que chacun peut avoir une vision différente du jeu, que chacune d'entre elles est respectable, et que de la confrontation des idées naît la nouveauté et la connaissance.

13)       Esprit d'équipe

Ce point peut paraître surprenant associé à un jeu dont l'essence mme est individuelle. En réalité, sa pratique en compétition s'effectue très souvent par équipe, en particulier dans le cadre des championnats interclubs. Dans ce cadre, le joueur est souvent amené à prendre en compte la dimension collective d'un match, avec le partage des ambitions et de la réussite, de ses contraintes (par ex. devoir proposer nulle dans une position supérieure pour assurer le gain du match à l'équipe) et de la vie en groupe (par ex. lors d'un déplacement pour une rencontre).

14)       Discipline sportive

Les échecs sont au carrefour du jeu, de l'art et du sport. Dans sa dimension sportive, il faut noter que les seuls talents et prédispositions naturelles ne suffisent pas pour gagner : il est nécessaire de les accompagner d'un fort investissement et travail personnel pour acquérir le bagage technique et théorique sans lequel ces dispositions ne sauraient s'exprimer à leur juste valeur. Il est également judicieux de pratiquer régulièrement le jeu, amicalement ou en compétition, car la progression vers la maîtrise ne peut se passer de l'expérience concrète sur l'échiquier face à un adversaire. Enfin, il n'est pas inutile de considérer que tous les grands champions accompagnent leur préparation théorique et mentale d'une forte préparation physique, qui aide à renforcer leurs capacités intellectuelles : "mens sana in corpore sano", on n'a rien inventé depuis les romains à ce propos !

 

Et, au-delà de toutes ces considérations formelles, il est à noter que ces qualités, par la pratique du jeu,  s’acquièrent sans effort apparent, de façon ludique et naturelle, générant presque toujours un plaisir d’apprendre et de « se remuer les méninges » !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Source : Annuaire de l'instruction publique de Suisse, paru chez Payot-Lausanne en 1977

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